Fascinant.
Belle fin.
Sans la séquence de fin le film n'aurait pas eu grand intérêt.
On comprend alors l'empressement du conducteur.
Oui je sais, ce n'est pas bien de commettre de tels excès de vitesse
et de griller quantité de feux rouges.
C'est même très dangereux, surtout pour les autres.
Ce n'est pas vraiment mon style de conduite.
Quand je me fais flasher c'est au maximum 10 km/h au-dessus de la vitesse autorisée.
Faut dire aussi que je n'ai qu'une Opel Corsa.
MAIS QUI PEUT QUAND MÊME MONTER SANS PROBLÈME À PRESQUE 170 KM/H.
Non mais.
Et il fut beaucoup reproché à Claude Lelouch
d'avoir effectué cette traversée de Paris.
Il a par la suite donné quelques détails sur la réalisation du film.
Cela mérite la lecture, c'est très intéressant.
« Depuis longtemps je voulais raconter
l'histoire d'un type en retard à un rendez-vous
qui commet plein d’infractions pour arriver à l’heure.
Pour moi, être à l'heure est une obsession.
Je suis capable de prendre des risques inouïs pour ne pas être en retard.
J'ai suggéré à mon opérateur Jacques Lefrançois, l'idée d'un plan séquence,
la caméra accompagnant un type qui a rendez-vous à Montmartre avec une fille.
Comme il est à la bourre, il traverse Paris à toute allure,
en grillant les stops et les feux rouges.
Si un Parisien veut aller de l'avenue Foch à Montmartre,
il n'est pas obligé de passer par les guichets du Louvre...
Il va prendre l'avenue de Wagram, bien sûr.
Mais, vous vous en doutez,
je voulais en même temps proposer une sorte de reportage.
Mon problème était d'élaborer un plan qui n'excède pas dix minutes
et qui trouve son intérêt à la toute fin avec la fille qui arrive sur les marches.
J'ai réfléchi au projet.
J'ai demandé à Elie Chouraqui, mon assistant à l'époque,
de voir quelles autorisations il nous faudrait obtenir.
Nous nous sommes vite rendu compte qu'un plan comme celui-ci
nécessitait de bloquer tout Paris.
Ce n'était même pas la peine de demander,
nous n'étions pas prêts à mettre en œuvre
les moyens d'un long métrage pour réaliser un court.
J'ai interrogé un cascadeur:
" Si je filme très tôt, qu'est-ce que je risque en grillant les feux rouges ? "
Il m'a expliqué que c'était de deux choses l'une.
En arrivant à un feu rouge, s'il n'y a personne dans le champ de vision,
le risque n'est pas bien grand de passer en force:
il faudrait qu'au même moment, un même cinglé déboule à la même vitesse.
Et s'il y a quelqu’un dans le champ de vision,
il est toujours possible de freiner.
Pour la beauté du film, il fallait vraiment que je ne m'arrête pas.
Que je stoppe à un feu rouge, et le film disparaissait.
Il y avait d'ailleurs neuf chances sur dix pour que nous n'arrivions pas au bout.
Nous avons accroché la caméra sur le pare-chocs de la voiture.
Bien sûr, nous avions décidé de sacrifier le film
et de tout arrêter au premier danger.
Nous roulions vraiment vite.
Je suis donc parti du postulat que si je roule vite
et que je ne vois rien, c'est qu'il n'y a rien...
Le seul inconvénient majeur c'était les guichets du Louvre.
Ils me faisaient peur à cause de leur absence de visibilité.
Pour le tournage, j'ai demandé à Chouraqui de s'y installer avec un talkie-walkie
et de me prévenir au moment où j'arrivais.
S'il ne me disait rien, c'est que tout allait bien.
C'est la seule véritable précaution que j'ai prise.
Comme Chouraqui ne m'appelait pas,
je suis passé sous les guichets à fond, 100 km/h,
car le passage est tout de même assez étroit.
Je ne savais pas que le talkie de Chouraqui était en panne...
En arrivant rue Lepic, j'ai été bloqué par un type qui livrait.
J'ai pris de l'autre côté, vers le Gaumont Palace, en destruction à l'époque.
J'ai remonté l'avenue Rocquencourt, ce qui me rallongeait énormément.
Je ne savais pas s'il allait me rester suffisamment de pellicule.
J'ai donc pris des rues en sens unique
pour arriver à Montmartre dans les temps...
J'avais fait le parcours une fois, lentement, pour bien déterminer les passages.
Je disposais de l'équivalent de 9-10 minutes de pellicule!
Il me restait 15 secondes pour couper le moteur,
descendre de voiture et prendre la fille dans mes bras.
Nous avions convenu que lorsque je klaxonnerais
elle monterait deux marches, pénétrant ainsi dans le champ.
Le plan séquence ne pouvait être réussi que sur ces dernières secondes.
Je m'étais dit que si je ne réussissais pas la première prise, je ne recommencerais pas.
Par superstition.
Si le miracle devait avoir lieu, il aurait lieu...
Et il a eu lieu.
En forçant quand même le destin, puisque nous avons grillé dix-huit feux rouges.
J'ai montré le film un peu partout.
Il n'a pas toujours été très bien accueilli
compte tenu de son manque de sens civique flagrant,
ce que je ne saurais contester.
Mais il a aussi ses fanas.
Quand j'ai montré le film pour la première fois à Los Angeles,
où le non-respect des règles de conduite est toujours fortement sanctionné,
le triomphe s'est mêlé à d'incroyables sifflets.
"C'était un rendez-vous" a toujours suscité la polémique,
mais il montre aussi tout ce qu'on aime dans le cinéma.
Comme j'aime le cinéma plus que la loi...
Je savais que je tenais un morceau de bravoure.
Je me disais, en toute modestie, qu'il y avait là la possibilité
de faire l'un des plus beaux plans de l'histoire du cinéma.
Les plans-séquences de dix minutes sont rares
en raison de l'étroitesse du magasin de la caméra. »
***
Si ça intéresse quelqu'un de rééditer cette prestation,
voici l'itinéraire parcouru:
Boulevard Périphérique
Avenue Foch
Place Charles-de-Gaulle
Avenue des Champs-Elysées
Place de la Concorde
Quai des Tuileries
Place du Carrousel
Rue de Rohan
Avenue de l'Opéra
Place de l'Opéra
Rue Halévy
Rue de la Chaussée d'Antin
Place d'Estienne d'Orves
Rue Blanche
Rue Pigalle
Place Pigalle
Boulevard de Clichy
(tournant abandonné à Rue Lepic)
Rue Caulaincourt
Avenue Junot
Place Marcel Aymé
Rue Norvins
Place du Tertre
Rue Sainte-Eleuthère
Rue Azais
Place du Parvis du Sacré Cœur
***
Et pour les allergiques aux voitures,
il faut savoir que Paris est plus petit qu'on ne le croit.
Le parcours peut se faire facilement à pieds en une petite après-midi.
Et une fois arrivé à destination,
comme récompense,
une glace à la réglisse chez le glacier à côté de la place du Tertre.
***
Un petit détail qui a son importance.
C'est certainement vrai.
Comme inscrit au générique,
ni trucage, ni accéléré.
Mais coupez donc le son de la voiture.
Vous aurez une meilleure notion de la vitesse réelle du véhicule.
La voiture ne roule pas aussi vite
que l'impression qu'elle donnait lors du premier visionnage, non ?
La magie du cinéma.
Une idée me vient.
Pourquoi ne pas refaire ce circuit mais avec juste quelques minimes modifications :
- Remplacer la voiture par une bonne paire de chaussures,
- Utiliser une caméra numérique avec une bonne carte mémoire, pouvant permettre un plan séquence un peu plus long que 10mn.
- Passer obligatoirement par la rue Poliveau (pour le souvenir).
Les deux compères partent de la rue Poliveau pour se rendre également à Montmartre si je me rappelle bien. Ce qui n'est pas forcément plus court.
Mais que ne ferait-on pas pour une glace à la réglisse.
Pour la carte mémoire, pas de problème, j'ai encore quelques palettes de disquettes du téléchargement d'internet. :-)
http://www.youtube.com/watch?v=AHn5Q15kaIA&eurl=http%3A%2F%2Fgazoline%2Enet%2Farticle%2Epcgi%3Fid%5Farticle%3D1159&feature=player_embedded#
Je le connaissais, il est intéressant, mais je trouvais que deux vidéos pour un article ça faisait beaucoup.
Alors j'ai préféré vous faire lire. :-)
Pour ce qui est de Marcel Aymé, il me semble que le trajet est plus long, car il ne commence pas rue Poliveau, mais dans un troquet ou les 2 compères font "connaissance". avant de rejoindre "Le lieu du Crime".
Une vision du film d'un oeil, croisée avec la nouvelle de Marcel Aymé, d'un autre oeil, et d'un plan de Paris, disons euh...... sous un troisième oeil, serait quelquechose d'intéressant à effectuer (à mon sens...), pour se rendre compte des différences.
Sont elles seulement limitées à la scène final ou beaucoup plus importantes.
Un autre film pourrait mériter ce traitement, il s'agit de "Cléo de 5 à 7" d'Agnès Varda...
Ce n'était absolument pas un reproche, je voulais juste dire que dans l'article j'ai préféré me limiter à une vidéo. Mais dans les commentaires elle est tout à fait à sa place, surtout qu'il n'y a pas redondance. Il n'y a aucune raison de la supprimer.
C'est vrai que les deux protagonistes se rencontrent dans un café puis vont rue Poliveau. Mais je trouve que la traversée de Paris se limite au transport des valises remplies de viande.
Aïe bis. Je n'ai jamais vu "Cléo de 5 à 7"...
Si je me rappelle bien, Cléo de 5 à 7, se déroule pendant 2h (de 5 à 7), pendant l'attente de resultats médicaux tres importants. La "promenade" fait découvrir je crois me rappeller le Sud de Paris. (Autour du Parc Montsouris).
Une scène d'anthologie montre un avaleur de grenouilles vivantes, qui sévissait à l'époque réellement sur les Grand Boulevards. Il y a bien longtemps que je ne l'ai vu, et vu mon équipement multi média, il est fort probable que cet état de fait se prolonge encore longtemps...
Mais je l'accorde volontiers, ce film n'a pas la truculence de la Traversée de Paris, même si sur un autre plan c'est aussi un film culte et qui ne sont pas si éloignés que ça de par les dates de tournage.
Mais c'est quoi ce sous-équipement multimédia? Pas de TNT, pas de box triple play là où tu habites?
Joli morceau de bravoure, mais je suis un inconditionnel de Monsieur Lelouch.
Merci M'sieur de m'avoir fait découvrir ce petit trésor !
Lelouch, parfois j'adore, parfois j'aime pas.
On va garder ce que j'aime. "Robert et Robert", "Le bon et les méchants", "Smic, smac, smoc", "Le voyou", "L'aventure c'est l'aventure" par exemple. Et "C'était un rendez-vous" aussi.
Mais on ne rit quand même pas beaucoup en sortant de la salle.
...
OK, c'est moi qui sors du commentaire...
Là c'est moi qui sors.
"Si le miracle devait avoir lieu, il aurait lieu...
Et il a eu lieu."
Mais c'est un peu bête. À cette heure matinale le marchand de glaces devait être encore fermé.